Musée d’Aquitaine,15 octobre 2024

Les 256 Fusillés de Souge

Conférence proposée par l’Association du Souvenir des Fusillés de Souge au cours d’une table ronde animée par Bernard LACHAISE, professeur honoraire d’histoire contemporaine, université Bordeaux Montaigne, Dominique MAZON et Jean LAVIE de l’Association du Souvenir des Fusillés de Souge, Arlette CAPDEPUY, docteure en histoire contemporaine, Nadine SAINT FLOUR, Association pour la Mémoire des Martyrs de l’Aéronautique

Qui sommes nous tout d’abord ?

Nous sommes une association mémorielle, l’Association du Souvenir des Fusillés de Souge. Au fil du temps et des recherches sur les fusillés, leurs vies, leurs actions résistantes, leurs arrestations et leur présentation devant le poteau d’exécution, notre association est devenue aujourd’hui celle de tous les fusillés, dans leur extrême diversité, idéologique, géographique, sociale, professionnelle. Dans nos rangs nous comptons de nombreuses familles de fusillés, des amis, et une série d’organisations très diverses, ayant perdu là de nombreux membres, ou représentant le large spectre des mouvements de résistance ou de déportés, tous militants dans leur champ propre contre l’idéologie nazi, le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie, la politique du bouc émissaire ».

Souge c’est quoi ?

Depuis 1845 c’est un camp militaire, champ de manœuvres et champ de tirs. Aujourd’hui le camp héberge le 13ème régiment des Dragons Parachutistes.

Il s’étend sur 2 800 hectares de forêt, à cheval sur trois communes, Martignas, St Jean D’Illac et St Médard en Jalles. Et notre association par convention avec l’armée y a fait ériger en 1998 un Mémorial composé, de stèles reprenant les dates des fusillades, les noms et âges des fusillés, ainsi que l’une des deux enceintes de fusillades.

Que s’est il passé à Souge pendant la guerre 39-45 ?

Lorsqu’ils envahissent la France, les Allemands occupent le camp et installent des lieux identifiés et dédiés aux fusillades. Les condamnés et/ou otages sont alignés devant des tas de bois appelés « bûchers » devant lesquels sont placés les poteaux d’exécution.

Notre association a identifié et honore 256 hommes. Nos prédécesseurs et nous-mêmes avons travaillé à partir des listes établies par les Allemands et transmises à la Préfecture. Nous disposons aujourd’hui de 93% d’actes de naissances. Les recherches continuent.

On dénombre 2 fusillés en 1940, 51 en 1941, 99 en 1942, 2 en 1943, et 102 en 1944.

Pourquoi 256 fusillés à Souge ?

Pour les nazis, Bordeaux était une base stratégique de première importance. C’était « LA » base de l’atlantique-sud, tournée vers les États Unis d’Amérique, vers Londres, mais aussi vers les colonies d’Afrique, le grand commerce international, le Japon (allié de l’Allemagne). Par exemple les Allemands importaient le caoutchouc indonésien via Bordeaux. Ainsi, Bordeaux, à proximité de l’Espagne, chemin de Londres et de l’Afrique du Nord pour les résistants qui voulait rejoindre la France libre, était, un port, un aéroport, avait des usines de production de pièces d’avions avec 4 000 salariés. Et dans le cadre de la protection de la façade ouest les Allemands firent construire (par les républicains espagnols réfugiés notamment) le « Mur de l’Atlantique », et la base sous-marine, générant la présence de forces armées importantes, et des mouvements de torpilleurs, de ravitailleurs, de sous-marins, qu’ils soient allemands, japonais ou italiens.

Le choix des hommes chargés de la répression dans une zone allant de Poitiers à Bayonne doit aussi à cet enjeu géostratégique. Préfets et policiers choisis par Vichy, chefs militaires et responsables de la police choisis par Hitler, étaient particulièrement engagés dans la mise en œuvre de l’idéologie d’exclusion contre, les communistes, les juifs, les francs-maçons, les Tziganes, les homosexuels, les résistants et patriotes de toutes obédiences, contre une classe ouvrière combative.

Qui étaient les fusillés ?

La moyenne d’âge est de 33 ans et près des deux tiers d’entre eux avaient moins de 35 ans. Le plus jeune avait 16 ans, 41 avaient 20 ans ou moins et le plus vieux 69 ans.

Si 71% d’entre eux sont des ouvriers ou employés (dont 21 ajusteurs des usines d’aviations) on trouve aussi 8 étudiants, 15 agriculteurs, 14 artisans et commerçants et 27 cadres dont 2 médecins, 5 enseignants, 3 ingénieurs, un philosophe, un armateur, un pilote d’avions….

60% d’entre eux étaient des Résistants girondins au moment de leur arrestation, les autres venaient de Dordogne, des Landes, de Charente et Charente Maritime, d’autres régions ou étaient étrangers pour 10 % (espagnols, soviétiques, italiens, hongrois, polonais, roumains, allemands, Haïtien …).

Tous, dans leur extrême diversité d’engagements (communistes, gaullistes, socialistes, juifs, chrétiens …) et d’appartenances aux multiples mouvements de résistance sur lesquels nous reviendrons, s’opposaient sous diverses formes à l’occupant et à ses alliés et voulaient libérer le pays.

Sur les 256 on dénombre 127 fusillés comme otages sur listes arrêtées par les Allemands et préparées par la police française, 77 condamnés (et pas tous à mort), les autres étant fusillés sans aucune procédure et aucun jugement.

Lors de certaines fusillades, deux heures avant l’exécution un papier et un crayon ont été donnés à chacun pour écrire une dernière lettre.

Qu’avaient-ils-fait ?

Certains, avaient été arrêtés pour être réputés communistes, d’autres pour avoir distribué des tracts, collecté des armes, levé le poing lors du passage des troupes, saboté la production de pièces d’avions, coupé des fils téléphoniques et électriques, provoqué des déraillements de trains, attaqué des convois, des officiers allemands et italiens, communiqué avec Londres, organisé des parachutages, recueilli des renseignements sur l’organisation des troupes allemandes, transmis des plans d’usines en vue de bombardements etc …

Mais après ces généralités revenons sur la chronologie des évènements.

Pour appréhender la période il n’est pas inutile à nos yeux d’évoquer la décennie précédent la déclaration de guerre.

1929 c’est la grande crise économique mondiale. Les rapports sociaux sont très tendus, les luttes sont dures avec un mouvement ouvrier affaibli.

Après la venue au pouvoir de Mussolini en Italie et de Hitler en Allemagne les ligues fascistes s’organisent.

Puis, c’est 1936, ses conquêtes sociales, la dissolution des ligues, mais aussi l’agression de Franco contre la république espagnole. Puis c’est 1938, et la pause sociale décrétée par le gouvernement, l’annexion de l’Autriche par Hitler, l’abandon de Munich, et la nuit de cristal en Allemagne au cours de laquelle 200 synagogues et 7 500 commerces et entreprises juifs sont saccagés. Le 15 mars 1939, Hitler envahit la Tchécoslovaquie. Le 1er septembre l’Allemagne attaque la Pologne. La France lui déclare la guerre le 3 septembre. Jusqu’en mai 1940 c’est ce que l’on a appelé « la drôle de guerre ». Il ne se passe quasiment rien au plan militaire, il n’en est pas de même au plan politique. En effet le 23 août 1939 c’est la signature du pacte de non-agression germano-soviétique, et au prétexte de sa non-condamnation, le 26 septembre 1939 les organisations communistes (ce qui inclut la Cgt) sont interdites.

C’est dans ce contexte que Pétain arrive au pouvoir, renonce à la lutte et s’installe dans la collaboration.

Immédiatement, remarquons les appels à résister, celui du général de Gaulle bien sûr, mais aussi ceux d’autres forces politiques et sociales, dont celui de Charles Tillon depuis Gradignan le 17 juin et celui d’Edmond Michelet à Brive ce même 17 juin.)

Voyons maintenant comment on en arrive aux fusillades.

En arrivant à Bordeaux fin juin 40 les Allemands se veulent courtois. Mais 1 mois et demi après leur installation ils vont montrer les limites de cette courtoisie. Un détachement de musique allemand défile devant la gare Saint Jean, un homme sur le trottoir fait un geste menaçant ou gesticule avec un bâton (on ne sait pas exactement). Il est arrêté, jugé et fusillé deux jours après. Il était juif. Le caractère exemplaire de cette fusillade est confirmé par une campagne allemande d’affiches où la population est « informée », en fait menacée.

De leur côté les autorités vichyssoises anticipent les demandes allemandes. Elles demandent l’autorisation d’engager des poursuites contre les communistes car les tracts fleurissent dans les rues et la contestation s ‘amplifie. La préfecture organise cette chasse et la reconstitution du fichier des communistes avec comme point culminant les 151 perquisitions et les 148 arrestations du 22 novembre 1940 et l’internement de tous ces militants et militantes quai de Bacalan d’abord, à Mérignac ensuite. Octobre 1940 c’est aussi la mise en place du statut des juifs.

Les résistances s’organisent. Faisant du renseignement et du recrutement principalement pour les gaullistes, (comme les plans de l’AIA par exemple), de la propagande, de la collecte d’armes, de l’apprentissage à leur maniement ou aux règles de sécurité dans la clandestinité pour les communistes.

En août 41 le PCF décide de passer à la lutte armée. C’est l’assassinat à Paris de l’aspirant Moser de l’armée allemande. La réaction est immédiate. Le décret Keitel annonce la politique et le code des otages. Pour un Allemand agressé 50 résistants-patriotes seront fusillés.

Le 21 octobre 41 le commandant Reimers est abattu à Bordeaux. 50 otages seront fusillés le 24 octobre. 35 communistes sont choisis au camp de Mérignac, les consignes allemandes sont de fusiller aussi des gaullistes. Certains d’entre eux détenus au Fort du Hâ sont envoyés à Souge avec des jeunes du Pas de Calais pris à la frontière espagnole, deux bretons stoppés sur la ligne de démarcation avec la photo du général de Gaulle dans la poche, ainsi que deux jeunes communistes et un syndicaliste.

Début 42 ce sont des isolés qui seront passés par les armes, ainsi que, venus du Nord pour certains, et récemment recrutés, des membres des Services Secrets de la Défense Nationale reconstitués par d’anciens militaires suite à la dissolution de l’armée, des radios amateurs liés à l’Intelligence Service, et un groupe de postiers (ceux que l’on appelaient les « ambulants ») qui utilisaient les trains de tri postal pour diffuser des tracts notamment, et arrêtés suite à l’infiltration d’un mouchard dans les bureaux.

Juillet-aôut-42 la SAP (section des activités politiques dans la police dirigée par le commissaire Poinsot) essaye de remonter les filières de livraison de tracts en gare de Bordeaux. À force de pister, de chercher les liens entre expéditeurs et destinataires, elle tient un des protagonistes, un autre, puis trouve un carnet rempli de noms, et en cascade procède à de nombreuses arrestations dans les milieux des entreprises de l’aéronautique.

17 septembre 42 : un attentat au cinéma le Rex à Paris fréquenté par des officiers et soldats allemands provoque 2 morts et 19 blessés. La décision est prise de fusiller 116 otages. Seuls 46 d’entre eux sont internés à ce moment-là, dans la « réserve » qu’était le Fort de Romainville. Qu’à cela ne tienne ! 70 seront fusillés à Bordeaux le 21 septembre, dont 58 girondins et parmi eux de nombreux syndicalistes arrêtés l’été précédent mais aussi des charentais FTP qui organisaient entre autres actions l’acheminement des armes volées dans le dépôt allemand de Jonzac.

Les 1er groupes FTP mis en place en Gironde sont déjà quasiment décimés.

1943 sera une année charnière.

Fin 42 c’est le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord et la mesure de rétorsion : l’occupation de la zone non occupée.

Avec la victoire de Stalingrad l’espoir renait, c’est le débarquement en Italie, la libération de la Corse.

Les Allemands ont besoin de main d’œuvre, c’est le STO (service du travail obligatoire pour les jeunes des classes 20, 21, 22), l’accélération de la déportation, tant des politiques que des juifs, la fin de la politique des otages inefficace même du point de vue allemand. On ne dénombre à Souge « que » 2 fusillés.

1943 c’est aussi la réunification de la CGT, l’envoi d’une délégation permanente du PCF à Londres et à Alger, le soutien de toute la Résistance à de Gaulle face à Giraud notamment et aux velléités de domination américaine, l’unification d’une partie de la résistance, c’est Jean Moulin, le Conseil National de la Résistance et la conférence de Téhéran où est décidé le débarquement en Normandie.

Année charnière aussi 43, c’est la reconstitution des FTP, la naissance de nouveaux mouvements tel le corps franc Marc en Gironde, ou en Charente maritime le développement du mouvement Honneur et Patrie lié à l’OCM et à Libération Nord.

1944 sera l’année la plus meurtrière à Souge :

102 résistants sont fusillés durant les 8 premiers mois de l’année. 44 d’entre eux avaient moins de 25 ans.

La diversité est sans aucun doute la caractéristique à retenir : diversité, des mouvements concernés, des territoires d’intervention de la police et/ou des allemands, des origines géographiques des résistants et plus particulièrement des responsables qui du fait de la répression « ne tenaient pas plus de trois mois », diversité enfin de nationalités des combattants. C’est l’année aussi où subsistent des inconnues, des doutes, sur l’identité des victimes, sur les autorités ayant ordonnées les exécutions, sur les motifs des décisions allemandes.

Agissant en Charente maritime, le mouvement Honneur et Patrie dont beaucoup de membres sont à l’OCM (Organisation Civile et Militaire) et d’autres à Libération Nord, atteint un développement maximum en 1943. 110 cadres répartis en sections spécialisées (renseignements, liaisons, instruction, ravitaillement) couvrent ce département.

La collecte de renseignements militaires (sous la responsabilité du commandant Lisiack, chef du réseau Centurie) s’effectue avec le problème de leur transmission à Londres. La diversité des professions des membres du mouvement est notable: du pilote d’avion, au receveur des postes. À partir du 22 octobre 43 une série d’arrestations, (83), stoppe l’action du groupe. Les interrogatoires sont, là aussi « musclés ». Il y aura 21 condamnations à mort, exécutées le 11 janvier 44 et 38 condamnations aux travaux forcés, à la déportation.

Par ailleurs, envoyés par les responsables nationaux des FTP, de nouveaux « inter-régionaux » rejoignent mi 43 notre région et notre département.

Le contact avec les quelques militants locaux rescapés est établi.

Le groupe Bourgois (du nom de son chef) formé de quelques unités en avril comptera jusqu’à 70 membres en septembre 43, et sera présent dans la forêt de la Double, aux Chantiers de la Gironde, à Parempuyre, chez Poliet et Chausson, à Lormont, à Bourg sur Gironde, à l’usine Walter au Vigean.

Les activités du groupe vont de la diffusion de la Vie Ouvrière clandestine, à l’édition du journal des FTP, à l’apposition d’étiquettes auto collantes sur les murs, ou à la vente de bons de souscriptions pour alimenter les caisses de solidarité. Parmi eux les italiens FTP-MOI assassinent un officier des services secrets italiens. Mais c’est l’action de sabotage qui prédomine et notamment des déraillements de trains, des récupérations d’armes auprès de sentinelles allemandes, des câbles électriques et/ou téléphoniques sectionnés. Mais suite à des dénonciations le groupe est démantelé à l’automne 43. 17 seront fusillés, le 26 janvier 44, 13 mourront en déportation, 20 survivront.

Voilà pour les fusillades de janvier 44 issues de la répression de 43.

Après les fusillades de janvier, et celles de plusieurs isolés, le 19 avril, de 7 israélites (ils sont ainsi désignés sur les listes) réfugiés en Dordogne et coupables pour la plupart d’entre eux d’être juifs résistants sont exécutés.

Le 9 mai ce sont six soviétiques incorporés de force dans l’armée allemande et cantonnés à Soulac, qui sont exécutés pour avoir fomenté une attaque contre des sous-officiers allemands et un local de réserves d’explosifs.

Enfin la dernière fusillade est celle du 1er août.

Sur les 47 fusillés honorés, 14 venaient de la prison de Bergerac. Les allemands sont acculés et particulièrement sauvages dans leurs réactions, à Prigonrieux et dans la région de la forêt de la Double notamment.

Le Corps Franc de Libération Marc, animé par Lucien Nouhaux est très actif en Gironde au printemps 44 mais infiltrations et imprudences auront raison de son organisation et du courage de ses membres. La commune d’Eysines et l’association autour de la famille Baudon dont la maison cachait les armes honorent régulièrement les six fusillés du groupe.

D’autres maquis de la région vont subir la loi de rapports des forces disproportionnés.

3 000 soldats allemands (Wehrmacht et SS), aidés de miliciens attaquent le maquis de Vignes-Oudides dans le Médoc le 25 juillet 44. Une hécatombe, dont 6 fusillés à Souge.

Deux autres jeunes, l’un rejoignant le maquis de la Ferme de Richemont à Saucats, l’autre circulant dans la contrée subiront le même sort. Ce maquis était constitué de jeunes, certains du Lycée Montaigne à Bordeaux qui s’entrainaient avant d’entrer en action.

Serge Duhourquet natif de Bègles, sera, lui, pris dans un maquis landais avec trois autres camarades.

Enfin autre particularité notable, l’histoire des « Dix du train fantôme ».

Parti de Toulouse le 3 juillet 44, ce train, chargé d’environ 650 résistants français et étrangers, arrivera à Dachau le 29 août, où il déposera 473 hommes avant de continuer vers Ravensbrück où 63 femmes arriveront le 1er septembre. Attaqué par la Résistance ce train va errer, tenter de passer par Bordeaux. Il sera vidé à Bordeaux, le 9 juillet. Les hommes seront entassés pendant trois semaines, à la synagogue et à la caserne Boudet pour les femmes. Pour des raisons mal connues, 10 d’entre eux (pourquoi ces dix, nul ne le sait encore), complèteront la liste des fusillés le 1er août. Parmi ces dix on retrouvera des républicains espagnols, un inspecteur de Police, un philosophe, chef d’un réseau de l’Armée Secrète, un étudiant roumain appelé Docteur Madeleine, appartenant au Mouvement de Libération Nationale, un militant SFIO, assurant de nombreux passages en Espagne. Le plus jeune de ce groupe, 18 ans, est un jeune étudiant juif parisien, engagé comme agent de liaison à bicyclette dans les FTP.

Avec eux, aussi un résistant, d’abord « gergoviote » puis sous les ordres de Pierre de Bénouville puis d’Henri Frenay, sera également fusillé

En conclusion 5 remarques :

1) Si seuls des hommes ont été fusillés (les Allemands ne reconnaissant pas aux femmes la qualité de combattantes), nous associons à leur hommage, leurs mères, femmes, compagne, sœurs, décédées en déportation, tant leur rôle a été essentiel et la Résistance souvent une affaire de famille.

2) Nous n’aurions pas pu dire et écrire sur ces évènements sans la présence forte des familles de fusillés qui nous permet de conserver l’approche humaine indispensable à tout travail de mémoire. Parler d’un père, d’un grand père, d’un frère, d’un oncle, d’un membre de son parti, d’un adhérent de son syndicat, d’un voisin, d’un membre de sa communauté, donne à l’appropriation de l’histoire, cette approche humaine complémentaire à l’apport scolaire ou académique, car la guerre, ce ne sont pas seulement, les jeux, les tanks ou les leaders, ce sont aussi les émotions, les larmes que l’on voit monter quelquefois, lors des visites du Mémorial par les proches des victimes ou par les lycéens et collégiens.

3) L’idéologie d’exclusion, de rejet de l’autre par la violence notamment, a sous tendu tous les actes de la barbarie nazie souvent aidée par la collaboration vichyste. Aujourd’hui certains débats et certaines attitudes, de stigmatisation, de l’étranger, du musulman, du chrétien, du juif, de celui qui est différent, doivent nous alerter.

4) Cette période nous enseigne que dans un pays occupé, désorganisé, dans la clandestinité, des organisations se sont, reconstruites, rapprochées avec leurs différences et leurs convergences, unifiées, et engagées ensemble dans une lutte de libération du territoire et de reconquête des libertés autour d’un programme de rénovation du pays et de progrès social : le programme du CNR dont chacun se félicite encore aujourd’hui qu’il est un filet de sécurité face aux crises diverses.

5) «Oublier… jamais» un beau slogan. Mais il relève du vœu pieu si en même temps ne sont pas prises les mesures économiques, sociales, politiques, d’éducation, pour le faire vivre au concret. Le « Vivre ensemble » dans la paix et le respect de tous est à ce prix.

Outre l’honneur aux fusillés le travail de mémoire de notre association porte aussi cet objectif.